Art Et Culture

Entrevue avec l’ambassadeur du Love Suprême : Koriass au Centro

PAR:
Simone Lirette

Les fans de Koriass ont eu de quoi se mettre sous la dent en 2016. Il avait conclu l’année précédente avec la sortie d’un EP préparatoire à son album, histoire de mettre l’eau à la bouche au public. Petit Love a mis le ton, sans dévoiler l’ampleur de l’œuvre qui s’apprêtait à rassasier les attentes. Love Suprême est alors lancé le 5 février 2016 au Cercle à Québec, puis affiche complet le lendemain au Club Soda pour l’édition montréalaise.

Dans la même semaine, son passage sur le plateau de Tout le monde en parle amène un sujet trop peu abordé à la table des Québécois-es : la culture du viol. Sa rigueur d’esprit, son témoignage et sa sensibilité à heure de grande écoute lui ouvrent un nouveau pan de public. Il y a vraiment un avant/après la diffusion de l’entrevue pour le rappeur présent dans le paysage hip-hop depuis une dizaine d’années. « Il y a toujours des fidèles! Je dirais que le trois quarts des gens qui sont dans les shows me suivent depuis un bout, savent qui je suis et sont prêts à faire le party comme ce soir, mais il y a quand même un phénomène qui s’est passé après Tout le monde en parle. Des gens qui ne me connaissaient pas avant qui viennent me voir maintenant. C’est un avantage que je n’avais pas vraiment considéré! »

De son vrai nom, Emmanuel Dubois (comme le dicte fièrement sa fille ainée sur la cinquième et ultime piste de Petit Love) diversifie ses sorties et incarne plusieurs rôles auprès de ses publics. Depuis peu, il occupe les fonctions de porte-parole de la campagne Sans oui, c’est non! et de conférencier de la tournée des cégeps Sexe, égalité et consentement avec Julie Miville-Dechêne, présidente du Conseil du statut de la femme, et Marilyse Hamelin, journaliste indépendante. « C’est vraiment différent! Quand je fais les conférences ou un spectacle, je ne suis pas dans les mêmes fonctions. Un spectacle, ça relève plus du personnage, de la fiction, de l’art. Quand je fais une conférence, c’est moi qui vais parler de sujets vraiment pointus, de la culture du viol, du féminisme, avec mes opinions réelles. »

Au Boquébière, ce samedi, c’est une performance toute en générosité, en intensité et en humour qu’il offre aux Sherbrookois-es avec l’aide de ses fidèles acolytes DJ Manifest et Bobby One. Des chansons de ses derniers albums ont côtoyé Love Suprême et Petit Love tout au long de la prestation. « Le genre de musique que je fais se prête bien à des petites salles, comme ce soir au Boquébière. Il y a quelque chose qui est un peu plus trash dans l’ambiance du spectacle. » La foule en sueur et les cœurs « avec les deux mains », à la demande de Koriass, témoignent bien de l’ambiance survoltée et du love suprême qui planaient au Boq.

L’album maître de cette tournée, Love Suprême, est une œuvre tissée autour du narcissisme et de la recherche d’approbation. « Pour la thématique de l’album, je vais chercher quelque chose de vraiment deep en moi, qui me fait chier de moi-même. » Il ajoute que ça peut aller jusqu’à lui nuire au niveau créatif, car il y a une constante remise en question à savoir si le public va aimer. « J’ai construit l’album avec une trame narrative logique, avec les interludes de Gilbert Sicotte. Au début, je suis super arrogant. Je veux être légendaire à tout prix. Au fur et à mesure, il y a une logique de vulnérabilité qui rentre. » Une quête d’amour qui semble avoir touché une corde sensible du public qui répond bien à l’album et à la tournée où l’on peut voir quelques curieux et plusieurs fidèles qui récitent le livre ouvert qu’est Koriass sur scène.

–Crédit photo – Drowster