Urbanisme et développement

La brise estivale soufflera jusqu’au Quartier Alexandre!

PAR:
Marie-Cristine Pachès

On entend souvent de nombreuses critiques à l’égard des jeunes… Ils sont trop ceci ou pas assez cela. Pourtant, à mon œil à moi, les nouvelles générations sont allumées et bien connectées avec leur milieu. Elles se tiennent au courant des grands enjeux et fourmillent d’idées pour améliorer notre société. Elles sont souvent créatives, écolos et connaissent la valeur des bons moments partagés avec ceux qu’on aime. C’est donc avec beaucoup d’enthousiasme que je suis allée à la rencontre de deux des trois membres fondateurs du collectif La Terrasse; l’heureux trio qui s’est vu confier par la Ville de Sherbrooke l’aménagement de parcs éphémères dans le quartier Alexandre.

Photo : Frédéric Gosselin instagram.com/fuseau.solaire

Retour sur l’été 2020…

Durant le premier été de la pandémie, la Ville s’est mise à la recherche d’idées lumineuses pour égayer le Centro. Après quelques coups de fil, beaucoup d’huile de coude et en un temps record, Wellington-sur-Mer a vu le jour au cœur de Wellington Nord. Le projet-phare a fait le bonheur des petits et des grands durant plusieurs semaines. Il a également bien joué son rôle et a égayé notre cher centre-ville qui avait connu (et qui continue de connaitre) des jours difficiles. Il a même récemment remporté le mérite Ovation municipale dans la catégorie spéciale Résilience innovation – pour l’aménagement et l’occupation du territoire.

Néanmoins, malgré les éloges, plusieurs citoyens et commerçants ont déploré le fait que certains secteurs du centre-ville n’avaient pas bénéficié d’autant d’amour… Afin de répondre à cette demande légitime, la Ville a débloqué un budget pour que, cet été, la brise estivale souffle jusque sur le Quartier Alexandre! Le but étant de créer des espaces éphémères dans le parc du Petit-Canada ainsi qu’à l’entrée secondaire du parc Judes-O.-Camirand, située sur la rue Alexandre, un espace plutôt triste et négligé qui passe souvent inaperçu dans le secteur…

Esquisse préliminaire de l’aménagement de l’entrée du parc Judes-O. Camirand, réalisée par Xavier Sylvain

Appartement avec vue

Quand Matisse Nadeau-Décarie et son coloc Raúl Garate Anderegg ont eu vent du projet, ils se sont aussitôt mis à y rêver… Normal: leur appartement est situé en face du parc du Petit-Canada! Pour ces deux jeunes gens qui n’ont même pas de balcon pour profiter des beaux jours de l’été, l’idée de pouvoir imaginer un espace vivant, ludique et agréable, en plein cœur de leur vie de quartier, était des plus attrayantes.

Ils ont donc discuté avec leur ami Xavier Sylvain et tous les trois se sont mis à plancher pour présenter à la Ville un projet clé-en-mains qu’elle ne pourrait pas refuser! «C’était vraiment intéressant pour nous de recevoir un dossier comme ça. On a des collaborateurs de longue date qu’on connait bien et avec lesquels on fait souvent affaire. Personne ne connaissait ces jeunes-là et ils sont arrivés préparés, solides, passionnés et surtout très concernés et intéressés à faire vivre leur milieu. On est tout de suite tombés sous le charme!» confie Philip Bastarache, conseiller à la dynamisation, secteur du centre-ville pour Commerce Sherbrooke.

Photo : Frédéric Gosselin instagram.com/fuseau.solaire

La force d’une équipe complémentaire

Matisse Nadeau-Décarie, celle qui allie design et esprit vert

C’est au parc du Petit-Canada que j’ai fait la connaissance de Matisse et Raúl pour apprendre qui se cachait derrière ces belles idées. «Je suis arrivée à Sherbrooke il y a deux ans pour entamer un baccalauréat en études environnementales», me raconte cette fille d’une designer d’intérieur et d’un architecte qui aime exprimer son amour inné pour le design en concrétisant des projets verts. «J’ai emménagé dans le quartier au bout d’un an parce que j’ai tout de suite eu un coup de cœur pour l’endroit. On est à proximité de tout, pas besoin de voiture et la rue regorge de beaux endroits à connaitre comme les Zerbes Folles ou la boutique À Fleur de vie. J’ai ensuite cherché un coloc et c’est comme ça que j’ai connu Raúl!»

Photo : Frédéric Gosselin instagram.com/fuseau.solaire

Raúl Garate Anderegg, celui qui rêve d’un quartier vibrant et festif

«Je ne suis pas d’ici, ça s’entend!» me fait remarquer le Suisse en riant. «J’étudiais à l’Université de Genève et j’ai fait un an d’échange à l’UQAM en 2018-2019. Je suis tombé en amour avec le Québec et j’avais vraiment envie de revenir. Le contexte de la pandémie me permet d’habiter ici depuis décembre 2020, tout en poursuivant ma maîtrise en études urbaines à l’UQAM.» Celui dont le sujet de mémoire est «L’intégration des coworkers dans les quartiers» me confiera également plus tard que, pour sa part, c’est le Café Soko qui est devenu son lieu chouchou dans le quartier Alexandre!

Photo : Frédéric Gosselin instagram.com/fuseau.solaire

Xavier Sylvain, celui qui veut créer des espaces verts qui rendent heureux

Le doyen du collectif, âgé d’un vénérable 28 ans, est également étudiant à la même maîtrise que son collègue Raúl. Il partage aussi la tâche d’assistant de recherche avec lui puisque les deux comparses s’intéressent à des enjeux similaires. Grand voyageur et bourlingueur, Xavier s’est d’abord orienté vers le tourisme d’aventure et les grands espaces verts. Puis, il a réalisé que «la ville avait énormément à offrir par la créativité qui en émane et sa pluralité.» Le projet actuel lui offre la possibilité de répondre à cette constatation à l’effet que «dans la plupart des villes nord-américaines, il manque cruellement de lieux publics intéressants où pleinement vivre la vie quotidienne et éviter la monotonie du métro-boulot-dodo. L’espace public moderne a perdu un aspect important accordé au plaisir, à la détente, à la spontanéité et à la sociabilité.»

Le Village Au-pied-du-Courant, réalisé par La Pépinière, espaces collectifs compte parmi les exemples qui ont inspiré le Collectif La Terrasse

Redonner au quartier qui les a accueillis

Tout au long de notre rencontre, j’ai été à même de constater à quel point les créateurs sont passionnés par ce qui les attend. Ceux qui devront d’abord procéder à un bon nettoyage des lieux, puis construire les éléments de l’aménagement en amont, commenceront à ériger les installations à la mi-juin dans le but de procéder à l’inauguration officielle avant la Fête Nationale. Je les questionne afin de savoir s’ils auront de l’aide, si des entreprises de la région leur ont offert un coup de pouce ou même des rabais. «Non, le but n’était pas non plus de faire de la publicité pour une entreprise. Le projet n’a rien de mercantile. C’est plutôt comme un cadeau, d’un groupe de personnes à un autre, pour enjoliver le quotidien de tous. La Ville nous a octroyé un budget, mais on fera tout nous-mêmes», m’explique Raúl.

Photo : Frédéric Gosselin instagram.com/fuseau.solaire

Matisse renchérit: «On veut donner de l’amour au quartier, que les gens le découvrent, qu’ils s’approprient l’espace et s’y sentent chez eux!». Pour ce faire, des tables, des chaises, des parasols, des espaces de jeux et même une petite scène seront aménagés. Afin de diminuer les îlots de chaleur, des constructions seront érigées, de nombreuses plantes seront ajoutées et des couleurs douces seront utilisées. «On souhaite vraiment créer un lieu attractif qui deviendrait une destination prisée, une alternative au lac des Nations et aux autres installations du centre-ville», précise-t-elle. Évidemment, le trio s’est également assuré d’intégrer des matériaux recyclés et/ou renouvelables afin de réduire au maximum l’empreinte écologique de leur projet.

Esquisse préliminaire de l’aménagement du parc du Petit-Canada, réalisée par Xavier Sylvain

Être près des gens et à leur écoute

Quant à la pérennité de ces aménagements dans ce secteur en particulier, ceux qui célébreront leur 24e anniversaire en même temps que leur projet verra le jour sont plutôt optimistes: «On part du principe que les gens sont de bonne foi et qu’ils seront heureux qu’on mette de l’amour ici. Une page Facebook les informera de l’avancée des travaux, on y mettra des photos. Notre but est vraiment de nous rapprocher de la communauté, de permettre aux riverains de s’exprimer, de les écouter et d’être transparents dans le processus.» Raúl ajoute qu’en tant que futurs utilisateurs récurrents de l’endroit, ils espèrent aussi qu’il devienne un espace de rencontre sécuritaire où ils pourront échanger avec leurs voisins et ainsi s’ancrer davantage dans leur quartier.

Photo : Frédéric Gosselin instagram.com/fuseau.solaire

La prochaine étape de l’équipe consistera à faire la tournée des commerces du Quartier Alexandre pour recueillir des cadeaux qui feront l’objet d’un concours-photo sur la page Facebook du collectif; une autre belle façon de découvrir le secteur! D’ailleurs, pourquoi avoir choisi «La Terrasse» comme nom pour votre groupe? «Au départ, on pensait voyages et vacances… Mais dans le contexte actuel, les terrasses sont presque devenues des icônes! Elles sont synonymes de plaisirs et de rencontres festives en plein cœur de la ville et c’est exactement ce qu’on souhaite créer!» conclut Raúl en souriant.

Pour tout connaitre de l’avancée du projet et éventuellement participer au concours, suivez la page Facebook du Quartier-Alexandre. Au cours des prochains jours, celle-ci évoluera pour davantage mettre de l’avant ce projet.