Visages du Centro

Les Visages du Centro : qui se cache derrière Ultra Nan?

PAR:
Marie-Anne O'Reilly

Ils sont impliqués et ne cherchent pas à être le centre de l’attention. Ils souhaitent créer du beau et du bon pour que nous puissions profiter d’un milieu de vie dynamique et vivant. Ils sont ces visages que nous croisons à tous les jours au cœur du centre-ville.

Pendant la prochaine année, vous aurez la chance de découvrir ces visages du Centro. Ces personnes qui croient au développement du centre-ville et qui s’y impliquent tout au long de l’année à grands coups de passion et d’amour.


Vous l’avez peut-être déjà croisé sur la rue Wellington, sans savoir qui il est. Mais derrière son anonymat, il est une figure bien connue du centre-ville avec son personnage Ultra Nan qui, au fil des ans, a gagné le cœur des Sherbrookois. Rencontre avec un dessinateur peu ordinaire…

Les origines

Ultra Nan, c’est un petit bonhomme fort sympathique dont les dessins se font le reflet de notre société actuelle, ses espoirs tout comme ses coups de gueule. Avec ses traits naïfs, son auteur a voulu créer un personnage tout simple, universel, dans lequel on peut facilement se reconnaître. Son objectif est d’être accessible pour tout le monde, ce que l’art ne permet pas toujours, malheureusement. Jamais de texte, ni de paroles, l’interprétation reste libre pour chacun. Mais ses illustrations, fortement évocatrices, laissent rarement indifférentes… Le dessin devient un outil pour faire passer un message et porter un regard critique envers notre monde. Avec ses thématiques très souvent engagées, Ultra Nan lui permet d’exprimer ses frustrations, de prendre position selon sa conscience sociale.

L’artiste a commencé par accrocher ses toiles un peu partout au centre-ville, dans les espaces publics, offrant ainsi une vitrine à son travail. Il utilisait les promenades de son chien pour commettre « ses méfaits », profitant d’une pause pipi pour accrocher un dessin sur un poteau. Une pratique qu’il a graduellement abandonné, devant la frustration de voir ses œuvres enlevées peu de temps après qu’elles soient affichées. Ultra Nan n’en a pas moins fait sa marque. Le fameux personnage est toujours présent à la Halte des Pionniers, est souvent exposé au Centre de diffusion ArtFocus et orne depuis tout récemment la vitrine du Bistro Kàapeh sur la rue Frontenac.

Pourquoi Le Centro ?

« Ça ne pouvait pas être ailleurs », répond l’artiste instantanément. Il a longtemps habité au centre-ville, il y a tenu un commerce, est propriétaire d’un immeuble et y a passé une bonne partie de sa vie. C’est donc tout naturellement qu’il s’est approprié le quartier. Il aime l’ambiance qu’on y trouve, son environnement bouillant de vie, sa faune urbaine éclectique… Le centre-ville est un petit monde. C’est son village à lui. Il connaît ses habitants, ses commerçants et ses personnages, hurluberlus, sans-abris et autres. Il peut rarement le parcourir d’un bout à l’autre sans dire bonjour au passage à l’une de ses nombreuses connaissances. Et bien-sûr on y retrouve un dynamisme culturel et artistique qu’il n’y a nulle part ailleurs à Sherbrooke.

Il se rappelle pourtant une époque où pratiquement tous les commerces étaient à louer sur la rue Wellington Nord. Ce qui ne l’a jamais empêché de croire à la vitalité de ce quartier. Depuis une vingtaine d’années, un énorme travail de revitalisation s’est réalisé au centre-ville et il a définitivement remonté la pente après des années plus sombres. Les incursions d’Ultra Nan dans le paysage du Centro y ont peut-être quelque chose à voir, même si le dessinateur se défend bien de prétendre à ce titre. (Accordons lui toutefois cet honneur qu’il ne veut pas se donner…) Mais le centre-ville pourrait selon lui s’épanouir encore davantage et faire encore plus de place aux artistes.

Une production prolifique

Il suffit de parcourir le web pour découvrir l’abondance des dessins d’Ultra Nan. Pourtant, il ne s’agit pas d’un gagne-pain pour l’artiste, qui d’ailleurs utilise souvent le troc en compensation de son travail et a ainsi établi plusieurs échanges avec des commerçants du centre-ville. Il s’associe également souvent à des organismes, utilisant son personnage pour soutenir certaines causes qui lui tiennent à cœur. Et si vous souhaitez lui acheter un dessin, il vous dira d’abord que vous pouvez le trouver gratuitement sur Internet… Ce pourquoi les reproductions d’Ultra Nan se vendent à prix très abordables. On retrouve également une déclinaison de ses dessins sur différents supports, tels que des aimants et des macarons vendus à 1$, une autre façon pour lui de rendre l’art accessible au plus grand nombre.

Car selon lui, la valeur de ses toiles va bien au-delà du monétaire. Elles ont bien souvent une valeur intime aux yeux des gens et représentent pour eux quelque chose qui leur est très personnel. Sa plus grande satisfaction est d’arriver à toucher les gens avec ses dessins. Il a le sentiment que Sherbrooke l’a adopté, que ses œuvres sont appréciées et qu’elles sont la bienvenue dans le milieu.

Vous le connaîtrez donc maintenant un peu mieux, mais toujours sans savoir qui se cache véritablement derrière le fameux Ultra Nan. L’anonymat qu’il conserve derrière son personnage lui laisse une plus grande liberté de création. Il ne travaille pas pour être reconnu ou pour le plaisir de son égo. Son but est purement artistique, et même social, c’est la façon qu’il a choisi pour changer le monde, un dessin à la fois.

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