Une fille en or : le chaos organique
Depuis le 17 novembre dernier, la salle du Théâtre Léonard Saint-Laurent se remplit du mercredi au samedi devant la pièce de théâtre Une fille en or, une création originale du théâtre du Double Signe, signée et mise en scène par Sébastien David.
Quatre filles naissent
L’idée de cette œuvre émerge d’une carte blanche offerte à l’auteur, il y a environ trois ans de cela. La seule contrainte était alors de créer autour du mythe du roi Midas, souverain qui émet le souhait de pouvoir transformer tout ce qu’il touche en or. C’est plutôt la fille de ce roi qui nourrit l’imaginaire de Sébastien David, captivé par cette statue d’or. L’équipe travaille alors pendant plusieurs laboratoires de création entrecoupés de séance d’écriture. La pandémie s’insinue dans tout ça et la métamorphose devient alors un moteur créatif important. « Comment agir quand le monde se transforme et que nous perdons le contrôle? Doit-on continuer à se battre ou simplement se résigner ? » questionne l’auteur.
Quatre métaphores se transforment
C’est cette idée de la métamorphose qu’on retrouve dans le parcours des quatre filles qui composent la pièce : la fille en or, la fille en terre, la fille en double et la fille en pixel. Chacune à sa manière, elles représentent une métaphore se rattachant à des enjeux importants de notre société actuelle. On peut ici penser à la richesse, à la célébrité, à la création et à la technologie. Si elles ont en commun d’être toutes perdues, elles n’ont pas toutes la même réaction et c’est ce qui fait la force de cette pièce, la variété des chemins parcourus et des interprétations qu’il est possible d’avoir.
Le texte est touffu et une relecture pourrait permettre de saisir toute la portée des réflexions de l’auteur, mais on arrive à s’accrocher comme public à ce qui nous touche, à ce qu’on a envie de creuser…littéralement parfois, comme la fille en terre qui cherche le chaudron pour se faire un macaroni au fromage. Sinon, on se laisse porter par le flot, pour être doucement enseveli sous les mots, avec l’envie d’aller se loger, comme la fille en pixel, dans un coin d’une vidéo youtube agréable où on passerait bien les prochaines semaines, plutôt que devoir magasiner les soldes du vendredi fou en ligne.
Quatre corps tombent
Il est nécessaire de saluer la performance de l’actrice principale qui se métamorphose, sous nos yeux curieux, en ces quatre femmes. La subtilité de son jeu, le travail physique de son corps et la durée marathonienne de sa performance où le texte est omniprésent sont autant de raisons de remarquer son travail. Elle est appuyée par le narrateur, Sébastien David lui-même, aux allures de Néo dans la Matrice (les référents aux années 1990 sont nombreux) et c’est un réel plaisir qu’on sent se jouer entre les deux. Certes, il ne s’agit pas d’une pièce facile pour un public néophyte, mais c’est certainement une pièce qui nous pousse à vivre une métamorphose nous-mêmes entre son début et sa fin.
Une fille en or est présentée du mercredi au samedi jusqu’au 4 décembre prochain. Procurez-vous vos billets ici !