Art Et Culture

Des livres et des beignes

PAR:
Caroline Fontaine

Avec l’automne tournent les feuilles, celles des arbres et celles des livres. La saison des couleurs est effectivement synonyme de sorties littéraires, Salon du livre de l’Estrie et doux moments de cocooning. Je vous ai donc préparé une sélection d’œuvres variées d’auteur.e.s de la région. Tant qu’à vous proposer un moment pour vous gâter et vous permettre de vous évader, j’ai aussi pensé vous concocter un accord livres et beignes. La boutique Ça beigne fêtait justement sa première année d’existence la semaine dernière.

Comme premier accord, je vous propose un recueil de nouvelles. Idéal à déguster en petites bouchées, le recueil de nouvelles fait souvent voyager dans plusieurs univers. Avec son recueil Les paresseux aiment les histoires brèves, Jason Roy nous amène dans des lieux étranges, inquiétants et parfois tordus. Si vous aimez arriver rapidement à la chute, avez envie d’être dépaysés et êtes ouverts à sauter d’un style à l’autre, ce recueil hétérogène est pour vous! Je l’accompagnerais alors du beigne classique sucre et cannelle, question de vous offrir un point de repère pouvant s’agencer à tout ce qui pourrait survenir dans ce livre.

J’ai (re)découvert la poésie à la naissance de mes enfants, alors incapable de plonger dans une histoire complète, constamment interrompue. Et ça a bien tombé, car la poésie québécoise était en plein essor. Nos auteurs du coin ont d’ailleurs participé activement à cette vitalité des mots. J’ai lu les slams de Goudreault, les poèmes narratifs de Nicholas Giguère, les paysages d’Hélène Dorion, mais celui que je recommanderais à n’importe qui désire faire le saut vers la poésie contemporaine est sans contredit Tabloid (Le Quartanier, 2015) de Mathieu K. Blais. Je lui joindrais le beigne le plus décadent, celui pour lequel tu hésites, car tu penses aux « conséquences » désastreuses qu’il aurait sur ta ligne, ta santé. Le s’mores m’apparaît tout indiqué pour contrer la peur que chaque jour se ressemble.

Tant qu’à vous parler poésie, je veux aussi vous proposer les livres de Véronique Grenier, Hiroshimoi (2016), Chenous (2017) et Carnet de parc (2019) (tous parus aux éditions Ta Mère). Reconnue pour son saccage de la langue où le « cœur » se verbalise, Véronique Grenier est une poète généreuse qui participe à garder vivant le milieu littéraire sherbrookois. À la fin de l’été dernier, elle nous a offert le magnifique Colle-moi dans la collection de poésie jeunesse à la Courte-échelle. Je servirais du doux avec ses mots, comme pour les accompagner, car les déchirures adviennent. Ses mots les pensent et les pansent. Un beigne oreo à tremper dans un verre de lait, comme une bouée qui nous permet de flotter au-dessus de nos peurs d’enfance.

Il est peut-être exagéré de dire que tout le monde connaît déjà la trilogie La bête de David Goudreault qui a connu une belle presse, mais je vais quand même vous proposer une autre œuvre de l’auteur estrien, Ta mort à moi. Je me suis régalée de son quatrième roman dont la couverture nous plonge déjà en plein automne et où l’on suit la quête de sens de la fascinante Marie-Maude Pranesh-Lopez. Encore ici, il faut accepter d’être bousculé, de se laisser mener par l’écriture déjantée de Goudreault et de suivre ce personnage où qu’il aille, car c’est surprenant les détours qui viendront. Pour la couverture halloweenesque empruntée à l’imagerie d’el Dia de los muertos (Jour des morts) mexicain, je lui appose le beigne du mois d’octobre à la citrouille.

La suggestion de Jason Roy : Et soudain Maureen de Marianne Lespérance (Roman tous publics paru aux éditions Leméac en 2020 où l’on suit Tara, vivant dans l’angoisse et la désillusion au retour dans sa banlieue, qui partira à la recherche de son amie d’enfance Maureen.)

La suggestion de M.K. Blais : Un bus pour Tokyo de Jean-Sébastien Huot (Herbes rouges, 2015) L’auteur dit qu’il a adoré ce « … roman inclassable et iconoclaste qui emprunte aux codes du livre dont vous êtes le héros. Une épopée déjantée à travers l’Amérique truffée d’orgies de malbouffe et de combats de kung fu. »

La suggestion de Véronique Grenier : Ornithologie de M.K. Blais, directement sorti des presses du Quartanier. Bien d’accord avec elle (!) et parions que la critique sera tout aussi favorable à ce deuxième recueil d’une poésie maîtrisée qui évoque avec force des images qui nous feraient parfois détourner le regard.

D’autres suggestions en rafale…

  • Louis Hamelin et La Constellation du lynx (Boréal, 2012);
  • Lynda Dion avec Grosse (Septentrion, 2018);
  • Mylène Gilbert-Dumas avec plusieurs coups de cœur du public et des libraires dont la trilogie de Lili Klondike (VLB éditeurs, 2008-2010);
  • Les éditions D’eux et leurs magnifiques livres pour enfants;
  • William S. Messier avec les recueils de nouvelles Townships (Marchands de feuilles, 2009) et Le basketball et ses fondamentaux (Le Quartanier, 2017);
  • Patrick Nicol avec Les manifestations (Le Quartanier, 2020) et plusieurs autres titres;
  • La poésie d’Alfred Desrochers et de sa fille Clémence.

Vous stressez déjà à l’idée de libérer un budget livres (et beignes!)? Sachez que la Bibliothèque municipale Éva-Sénécal possède plusieurs de ces œuvres ou que vous pourriez peut-être les trouver usagées au Tourne-livre. Cependant, si l’appel du livre comme objet se fait sentir, ou que vous cherchez des conseils plus personnalisés, sachez que la Librairie générale Appalaches est à la veille d’ouvrir ses portes sur la rue Wellington.